Il y a un siècle, la machine à coudre était entrée dans presque tous les foyers et devenait l’instrument de survie de très nombreuses femmes. Seules, célibataires ou veuves, avec ou sans enfants, très pauvres souvent, elles cousaient chez elles pour gagner leur vie. Embauchées parfois par des entreprises de confection, des bonneteries, des fabriques diverses, elles cousaient toute la journée jusque tard le soir, elles étaient aux pièces pour un maigre salaire. Elles vivaient dans le confinement de leur logement souvent très exigu, la machine à coudre occupant le centre vital de la pièce. Leurs petites mains ourlaient, piquaient, brodaient des merveilles.
Mon tour est venu de m’activer chaque jour devant ma machine à coudre. Je couds des masques, comme plusieurs couturières de ma paroisse, suivant le modèle de l’Afnor, j’essaie d’en produire le plus possible, ils seront distribués gratuitement à la fin du confinement. Mon enjeu est de baisser le temps d’exécution et d’accélérer la cadence, je suis passée de vingt à dix minutes pour un masque, je m’aperçois que le cerveau enregistre les gestes, je ne réfléchis plus, mes mains s’activent toutes seules !