La chute

C’était le dimanche 15 mars, ma dernière promenade sur la plage. Grande marée et petite pluie. Douceur et grisaille, quelques silhouettes au loin à la Giacommetti.

Le lendemain, le gris céda la place au noir. Second lundi noir du mois. Effondrement des marchés mondiaux, chute record et le jour suivant, le mardi, pour ma plus grande déception, le rivage fut interdit.

Le roman le plus lu en cet hiver 2020 est La Peste de Camus, on pourrait y ajouter La Chute.

Espace serein

La plage était déserte absolument. Pas une âme à l’horizon, pas une trace de pas. Ni devant, ni derrière moi. Seule sur le sable avec mon chien et bonheur soudain, bondissant. Impression d’infini, de liberté, envie de chanter à tue-tête sans le risque de déranger un passant.

Prémonition d’un futur confinement ? Ces photos datent de février. Ma solitude était une joie, dans ce paysage si calme, une mer opale, un ciel ouaté, un sable d’hiver brodé de rubans d’algues brunes. Le virus était loin en Extrême-Orient, et je marchais calmement sur la plage. Comme elle me manque !

25 mars

Mercredi dernier, ce fut un 25 mars étrange que celui de l’année 2020. La fête de l’Annonciation.

L’église était fermée depuis une semaine et ce matin-là le prêtre ouvrit grand son portail. Il était permis d’aller prier, quoique la case « prière » ne soit pas présente sur l’attestation de sortie.

A 19h30 toutes les cloches des églises ont sonné pendant dix minutes et nous avons posé à la fenêtre des bougies allumées. Nous avons lu le prmier chapitre de l’Evangile de Luc relatant l’Annonciation du Seigneur à la Vierge Marie. Nous étions confinés chez nous mais tous unis par le son, la lumière et la Parole.

Le temps passe

Depuis février, le temps s’est accéléré, puis arrêté, puis il est reparti, dans l’autre sens.

Ne le trouvant plus, ce temps insaisissable, j’avais cessé de bloguer, vacances avec les petits-enfants, travaux divers …

… et puis tout d’un coup, le temps s’est stoppé, le temps du pas le temps a laissé la place au temps élastique, sans contours.

A la vie frénétique, minutée, bruyante, s’est opposé le silence continu, immense, sans espace privilégié.

Le confinement est un temps de montres molles, que le changement d’heure cette nuit ne perturbera point.

Pendant que le drame se noue tout autour de nous, nous apprenons à vivre à reculons, à pas lents, à contre temps.

La lessive étendue au petit matin ne claque plus au grand air marin.