Esther Gobseck est l’un des personnages principaux de Splendeurs et misères des courtisanes de Balzac, et on peut dire qu’elle fut triplement confinée. Confinée professionnelle, car prostituée, vivant en maison close, avec un seul jour de liberté par semaine. Et plus tard, Esther dite La Torpille fut contrainte au confinement par un prêtre, le terrible abbé Carlos Herrera, qui l’enferma d’abord dans un couvent religieux, puis dans une chambre dont elle ne pouvait sortir que la nuit sans être vue.
La grisette était trop profondément prostituée pour être sincèrement amoureuse d’un homme, et pourtant elle fut saisie d’un amour pur pour le beau et faible Lucien de Rubempré rencontré lors d’un bal masqué. Sa condition de courtisane ne pouvait que nuire à la réputation du jeune poète et journaliste, qui tentait de faire fortune à Paris et qui se laissait manipuler par l’abbé espagnol, en réalité l’affreux Vautrin. Le faux abbé Herrera monta un plan permettant à Esther de revoir en secret son amoureux Lucien. Il l’envoya d’abord dans un couvent pour assurer son éducation religieuse et ses bonnes manières. Esther reçut le baptême et la communion, et se découvrit une foi catholique véritable et profonde.
Herrera et Lucien habitaient dans la même maison, l’abbé y fit venir Esther et embaucha deux filles sévères, comme deux chiens de garde, pour surveiller les amants. Esther était à nouveau séquestrée, mais le baron de Nucingen l’aperçut et en tomba lui-même follement amoureux. Le roman de Balzac est long, difficile à résumer en quelques lignes, les deux amants à la fin se suicident, laissant l’horrible Vautrin-faux abbé-bagnard évadé- mesurer ses profits. Ce qu’on retient de positif, c’est la transformation complète de la courtisane, son amour profond et sa piété, sa véritable splendeur dans ce monde de misères morales.
Comme quoi, le confinement peut avoir du bon !